« Un petit remords d'amour de rien du tout, qui avait grandi comme un chêne » (journal rural)
Sophismes 22/05/98
- Vous êtes content de vous ? s'enquit le directeur.
- Je ne l'ai toujours pas vue, répondit Antoine. Je ne sais pas si elle voudra bien prendre un verre avec moi.
- Il ne s'agit pas de ça, vociféra le directeur, je vous parle de votre carrière.
- Enfin, de ce qu'il en reste ! gloussa l'adjoint.
- C'est un travail idiot, déclara Antoine. Je n'aime pas ça.
- Et les actionnaires, vous y avez pensé ? s'étrangla le directeur.
- Pas vraiment, avoua Antoine.
- J'ai eu Vélizy au téléphone ce matin, reprit le directeur. Ils m'ont demandé comment se portait ma filière littéraire !
- Plutôt bien, répondit Antoine en souriant, je crois que j'ai fait des émules.
- Il faut bien prendre conscience que les romanciers sont des ratés ! éructa le directeur.
- L'informaticien est un être supérieur, ajouta l'adjoint. Il maîtrise l'ordinateur.
- Vous gâchez votre intelligence, poursuivit le directeur, c'est dégoûtant.
- On ne paie pas les gens pour écrire des romans, confirma l'adjoint.
- C'est un alexandrin, lui fit remarquer Antoine.
- Excusez-moi, je ne l'ai pas fait exprès.
- C'est dommage, dit Antoine, ça vous allait bien.
- Nos claviers ne sont pas faits pour ce genre de prose, reprit l'adjoint, d'ailleurs ils n'ont pas d'accents.
Il s'interrompit, l'air inquiet.
- Je vous vois interdit ; en était-ce un aussi ?
- Non, répondit Antoine, c'était une phrase très laide.
- Une phrase laide vaut mieux qu'un long discours, décréta le directeur. Quoi qu'il en soit, nous ne sommes pas là pour parler de littérature.
- Nous aurions pu sinon tenir brillant salon, risqua Antoine.
- Vélizy dit qu'écrire n'est pas digne de ses sbires, continua le directeur, mais moi je crois...
Il baissa la voix.
- Je crois qu'en fait, ils craignent une épidémie. Ils s'en fichent, eux, vous savez, de tout ça. Les clémentines et les pulls roses, ils n'y comprennent pas grand chose. Ils ont peur que tout cela dégénère en je ne sais quoi d'ingérable, une sorte de maison d'édition pleine de jeunes romantiques. Et ça ne manquerait pas de déplaire aux actionnaires.
Antoine se fichait des actionnaires. Il le lui dit.
- Ah, je vois ! dit le directeur, Monsieur est un idéaliste !
- Un idéaliste rêveur, ajouta l'adjoint.
- Un idéaliste rêveur romantique, précisa le directeur.
- Incompris de surcroît, gloussa l'adjoint.
- Vous n'irez pas loin, conclut le directeur.
Il ouvrit néanmoins le dossier jaune, lut à voix haute le passage surligné sur l'un des feuillets, puis le reposa sur son bureau.
- Je suis pourtant persuadé qu'il y a quelque chose à en tirer, affirma le directeur. Finalement, les histoires romantiques, on pourrait peut-être en faire du multimédia...
- Ça se vendrait comme des petits pains, confirma l'adjoint.
Le directeur devait réfléchir car il faisait soudain une drôle de tête.
- Dites-moi, Antoine, ça vous intéresserait de participer à la grande aventure du multimédia ?
- Multimédia mon cul, rétorqua celui-ci.
- Vous êtes grossier, Antoine.
- Non, répondit celui-ci, c'est de la littérature française. Du Queneau, précisa-t-il.
- Je ne connais pas, dit le directeur.
- Ça ne m'étonne pas, vous êtes un ignare.
- Peut-être, mais avec les autoroutes de l'information je vous assure que ça va changer, affirma le directeur, alors que vous, vous ne serez même pas dessus !
- Vous nous regarderez passer, ricana l'adjoint.
- Il n'y aura pas le moindre romantique, ajouta le directeur, c'est moi qui vous le dit !
- Les romantiques, ça avance tout doucement et puis ça fait des bouchons, déclara l'adjoint d'un ton sentencieux.
- De toute façon, ils n'entreront pas, glapit le directeur. Il y aura des péages.
Antoine se leva doucement, jeta un dernier regard sur les feuillets épars, sourit une dernière fois aux deux pingouins hilares puis se dirigea d'un pas tranquille vers la porte vitrée. Il repensait soudain à la grande marée et à son envie de crevettes, de palourdes et d'étrilles.
Un chroniqueur passe 30/04/98
Petit homme ventripotent, ne sens-tu pas l'amour qui t'attend ? Tu trottines, père tranquille, sur les chemins armoricains, et tu doubles ce marcheur qui se dit chroniqueur. Et tu galopes, petit homme, ton ventre gigote dans ton K-way rose et bleu, ton étonnant bedon tout plein de houblon. Le chroniqueur se marre, bien sûr, lui il cherche une histoire. Pour raconter, lundi, à des gens qui s'ennuient et qui croient comme toi que le grand amour se promène parfois sur les bords de mer. Mais que dire sur toi, petit homme bedonnant, quoi d'autre à raconter que ton accoutrement ? Petit homme tout pâle, d'une grande ville toute sale, respirant enfin le bon air marin, ne sens-tu pas dans tes narines la chance qui s'anime ?
La chance marche vers toi d'un pas décidé. On la devine déjà femme d'un cadre vieillissant. Et elle t'arrête, du chemin s'inquiète, et toi c'est ta fête, car c'est toi qu'elle a choisi, pour ta bonne tête. « Vous êtes du coin ? », risques-tu. « Oui, non, enfin des fois », répond-elle troublée. Un chroniqueur passe. Il s'éloigne en souriant. Parfois la vie des autres semble être un roman. Il s'étend sur une plage, un peu plus loin, il écoute les parisiens. Il ferme les yeux et plonge dans leurs vies, si jolies dans leur bouche, si jolies qu'elles sont louches. Le chroniqueur se relève et reprend sa marche imbécile sous le soleil d'avril. Il revient vers toi, mais tu ne le vois pas, tout occupé que tu es avec ta fiancée.
« Vous zavéka écrire votre numéro de téléphone sur ce papier-là, vous zavépa un stylo ? », souffles-tu. « Ah mais je viens juste d'avoir le téléphone, je connais pas le numéro », dit la malheureuse. Silence gêné. Un chroniqueur passe. « Vous voulez pas que je vous fasse un thé ? », dit-elle avec du sexe dans la voix. « Oh non non non non », t'entends-tu répondre de ta petite voix haut perchée. Le chroniqueur étudie avec attention une plante mauve. « Vos amis vous attendent ? », s'enquiert-elle. « Non non, personne ne m'attend », assures-tu en oubliant tes amis qui t'appellent papa, « et puis quand c'est comme ça, je ne donne jamais d'heure ». Le chroniqueur s'éloigne, et toi tu restes, tu renaudes. Elle te jette un regard insistant, et toi tu ne sais que t'enfuir de ce qui t'attire. Rien qu'un thé, te dit-elle, mais tu sais bien ce qui t'attend. C'est bien le genre de thé qu'on ne boit jamais.
Et le chroniqueur marin réclame une pinte à la terrasse du coin. La mer s'interroge comme lui sur l'issue de votre comédie, quand soudain tu ressurgis, solitaire et ravi. Un rendez-vous, ou un simple bécot ? Tes épaules de séducteur se pavanent dans ton K-way rose et bleu. « Chaque pot a son couvercle », écrit le chroniqueur dans son carnet à spirales. Il sirote sa bière et ajoute « c'est dans les vieux pots qu'on fait la meilleure soupe ». Et toi, petit homme, tu t'en va seul, dans le soleil couchant. Tu as connu le grand amour. Et maintenant tu penses à demain, au retour vers Pantin. Tu l'aimes tant, la Bretagne. On dirait qu'elle a été faite pour permettre aux parisiens de se prendre la main.
Les parallèles doivent se rencontrer 10/05/98
- Monsieur, j'ai refait le calcul dix fois de suite.
- C'est très bien.
- Et voici les dix résultats que j'ai trouvés. C'est complètement idiot,
la géométrie euclidienne.
- Qu'est-ce qui est idiot ?
- Les parallèles devraient se rencontrer.
- C'est complètement impossible. Leurs trajectoires ne se croisent jamais.
- C'est idiot.
- Peut-être, mais c'est un fait. Pourquoi tenez-vous tant à ce que les
parallèles se rencontrent ?
- Parce qu'elles vont dans la même direction.
- C'est précisement pour ça qu'elles ne se rencontrent pas.
- Moi, je voudrais rencontrer des gens qui vont dans la même direction que moi.
- Vous les rencontrerez à l'infini.
- Je serai sans doute mort.
- Sans doute, oui.
- C'est dommage.
- Oui.
- Il faudrait donc que je change de direction ?
- Pour les rencontrer, oui, il le faudrait.
- Et après ?
- Après, vous repartirez ensemble dans la même direction. En partant du
même point, vous formerez une seule et même droite...
- Mais une droite, entre nous, c'est idiot. Ca ne réfléchit pas, ça va
tout droit. Moi, je veux être tordu si ça me chante.
- Dans la vie, les droites sont tordues.
- Vous croyez ?
- Bien sûr : regardez les routes. Elles sont bien le plus court chemin
d'un point à un autre, non ?
- Oui.
- Elles sont bien tordues ?
- Incontestablement.
- Eh bien, les lignes droites sont tordues. C'est la seule explication.
- C'est un sophisme.
- Et c'est vous qui me dites ça ?
- Et les parallèles, alors ?
- Les parallèles tordues ?
- Oui.
- Leurs trajectoires se croisent parfois.
- A l'infini ?
- Non, n'importe quand. C'est imprévisible.
- Comment reconnait-on une jolie parallèle tordue d'une droite
quelconque ?
- Les tordus savent quand ils vont dans la même direction.
- Je me sens tordu.
- Vous avez raison. Vous n'êtes pas de droite, au moins ?
- Non, j'aime beaucoup les tordus.
- Ça doit être joli dans votre tête.
- Je ne sais pas. J'aimerais savoir jouer de la trompette.
Ca fait désordre 06/05/98
Frédéric écoutait distraitement les propos incohérents de Jérôme, qui avait
encore forcé sur la sangria. Leurs regards hagards s'étaient tournés vers une
grande blonde qui dansait devant eux, avec un air triste et un type joyeux.
- Elle a des jambes superbes, remarqua Frédéric.
- Y a pas que les jambes, dit Jérôme.
- Je crois que je suis amoureux, déclara Frédéric. Cette fille déchaîne déjà
en moi une véritable tempête érotique...
- Oui, elle est plutôt bonne, concéda Jérôme avec poésie.
- Mais ce n'est pas le physique qui compte ! nuança Frédéric.
- Non, bien sûr, dit Jérôme, mais ca joue un peu quand même...
- Ça joue un peu, admit Frédéric.
Il regardait toujours le sale type qui dansait continûment autour de sa blonde
comme pour marquer son territoire.
- Il a l'air stupide, déclara Frédéric. C'est sûrement un âne.
- Sûrement, dit Jérôme.
- J'ai beau m'y connaître en psychologie féminine, y a toujours quelque chose
qui m'échappe, confia Frédéric. Qu'est-ce qu'elle peut bien lui trouver ?
Ils réfléchirent longuement, sans succès.
- Tiens, regarde, il sort ! fit soudain Jérôme.
Dégoulinant de sueur, l'âne se dirigeait en effet vers le balcon où je sirotais
ma bière. Ah oui, je ne vous ai pas dit : j'adore les balcons. J'y passe le
plus clair de mon temps. On y fait de singulières rencontres.
- Super la zik ! déclara l'âne en m'apercevant.
- Oui, dis-je, c'est plutôt bien choisi.
- Super comme soirée ! Je suis complètement raide.
- Oui, tu as l'air.
- Super le balcon ! On peut gerber.
- Il y a un joli jardin en dessous, dis-je, l'air de rien.
- Ah ? fit l'âne, et il se pencha.
Je ne suis pas un mauvais bougre, mais il faut bien donner quelquefois un coup
de main aux copains : une petite poussée dans le dos et l'âne se mit à voler.
Quelques instants plus tard, alors que je m'aventurais à l'intérieur pour me
réapprovisionner, la blonde, quelque peu inquiète, me harponna :
- Tu n'as pas vu Folubert ?
- C'est qui, Folubert ?
- Mon copain. Celui qui a un tee-shirt Vache-qui-rit.
- Ah si, je l'ai vu descendre. Il avait l'air pressé.
- Il ne t'a pas dit où il allait ?
- Non. Il raccompagnait une rousse, je crois.
- Quel salaud, dit la blonde.
- Viens, dis-je, je vais te présenter Frédéric. C'est un type formidable.
- Je veux bien.
Frédéric fit un large sourire en nous voyant approcher. Il termina son whisky et
devint presque courageux.
- Bonjour, vous avez de très jolis yeux, récita-t-il.
- Ah ? dit la blonde qui s'attendait à ce qu'on lui parle de ses jambes.
- Vous êtes seule ? continua-t-il.
- Mon copain est parti sans prévenir. C'est un salaud.
- Ça ne se fait pas, répondit poliment Frédéric.
- Il est avec une autre, dit la blonde. Une rousse, en plus.
- Quel salaud ! dit Frédéric.
- Je ne veux plus jamais le revoir, continua la blonde.
- Je vous comprends, dit Frédéric.
- Vous au moins, vous n'êtes pas un salaud, présuma la blonde.
- Non, dit fièrement Frédéric, je suis romantique.
- Ah ? fit-elle, un peu inquiète. Pas trop, j'espère ?
- Oh non, juste ce qu'il faut, dit Frédéric et il lui parla de ses seins.
Moi, vous comprenez, je m'étais déjà éclipsé et j'avais regagné mon balcon avec
mon nouveau stock de bières. Un type complètement saoûl est venu s'appuyer
contre le rebord du balcon et a vomi avec conviction. Celui-là, je ne l'aimais
pas, mais alors pas du tout. Et puis, comme il n'avait déjà plus beaucoup
d'équilibre, il ne s'est rendu compte de rien. Je n'ai pas pu m'empêcher
d'expédier aussi son copain. Il n'y était pour rien, lui, il me trouvait même
sympathique et commençait à me raconter sa vie, mais bon, dans la salle il y
avait cette chanson de Jacques Brel, vous savez, « au suivant, au suivant... »,
alors... il y est passé aussi.
Ça m'embête surtout pour le locataire du rez-de-chaussée, lui qui était si fier
de sa terrasse. C'est vrai que ça fait désordre, ce mélange de corps et de vomi.
Les amours du petit photographe 03/06/98
Les histoires des grands
Pauvre petit photographe déambulant sous le crachin, tu n'as vraiment l'air de rien. Tu marchottes, tripotant ton Leica, respirant l'air marin. Perdu
sur la plage de Saint-Briac, à deux pas de la colonie que tu photographies,
la tête dans les nuages et les pieds dans la vase, tu songes à l'accompagnatrice, si jolie que tu voudrais bien qu'elle t'accompagne dans tes nuits. Elle s'appelle Eva, mais ça ne lui va pas. Tu l'appellerais « mon ange », ou quelque chose comme ça. Tu la tiendrais dans tes bras. Vous vous marieriez et auriez beaucoup d'enfants. Et cette fois, ça ne raterait pas.
Vos enfants seraient adorables, comme ce gamin plein de tâches de rousseur,
coiffé d'un bonnet Kickers, venu te soutirer une pellicule tout-à-l'heure.
Les gosses, ils ne comprennent jamais rien aux histoires des grands. Ils
font rien qu'à dire la vérité tout le temps, ça devient vite embêtant. Vous
aviez marché toute la journée, évitant de trop vos regarder, mais la
marmaille observait, la marmaille devinait. Et, ça et là, on entendait
murmurer « hein c'est vrai qu't'es amoureux d'Eva ? ». Tu ne répondais pas.
A présent, les minuscules sont rentrés au dortoir, et le petit
photographe déambule, l'air de rien. Eva déambule elle aussi sous le crachin. L'amour rend niais, et vous attendez bêtement sous la pluie le moment de vous croiser. C'est vrai qu't'es amoureux d'Eva...
Et tu la croises, elle te croise, et vous vous dites n'importe
quoi. Que vous aimez la pluie, ou n'importe quelle autre idiotie. « Autant passer la
soirée ensemble, puisqu'on est là », risques-tu. « Je ne m'attendais pas à
rencontrer des gens », répond-elle, émue. Et vos pas vous guident enfin vers la plage où les enfants savent bien que vous ne serez pas sages.
Le préservatif Jean-Paul II
Amour amour, le petit photographe t'a suivi. Il a pris le train puis le
ferry, et le voilà en Angleterre, en tendre tête-à-tête avec sa saisonnière. Il engloutit gaiement son gloubiboulga, et même sa gelée verte. Il l'entraîne dans un pub voisin, lui parle distraitement de son regard, en louchant sur son décolleté. Par pur intérêt artistique, bien sûr. Il pense à la distance focale, au grain du papier, à son grain de beauté, à son désir enflammé... Il termine sa Kilkenny.
Plus tard, elle le rejoint dans ce lit où déjà il s'impatiente. Elle
l'embrasse scolairement. Le petit photographe s'enhardit, il se fait plus précis. Mais son amour l'écarte, le repousse d'un « non non non, j'crois en Dieu » sans appel. Le petit photographe fait la grimace. Demain, peut-être. Il dort mal.
Le lendemain, son amour se fait plus tendre. Elle l'entoure de mille
attentions, il lui semble bien y voir un début de passion. Dans sa tête, des
neurones pleins d'espoir lui murmurent « cette fois c'est sûr, c'est pour ce soir ». Et le petit photographe, se glisse, plein d'appétit, dans un lit de promesses rempli.
« Le pape ne veut pas, chéri », explique la demoiselle au photographe aigri.
Le préservatif Jean-Paul II : pour tuer l'amour, il n'y a pas mieux.
Un amour de printemps
« Rennes est une bien jolie ville », songeait le photographe. Il aimait tant s'y promener, le Leica en bandouillière, lorsque revenait le temps des
jeunes filles en fleurs. Il était un peu le Doisneau des étudiantes
bretonnes, mais un peu seulement. Disons qu'il photographiait une étudiante
de temps en temps. Et que parfois, leurs relations allaient plus avant.
Mais parfois seulement.
Comme dans un film, elle cheminait en sens inverse. Elle, jeune philosophe
portant un violoncelle. Lui, jeune photographe portant son appareil. Nous
formerions un couple follement romanesque, pensait déjà l'apprenti
Doisneau. Elle lui sourit. Aussi convinrent-ils sans trop y croire qu'ils
s'étaient déjà vus quelque part, puis partirent en quête d'une terrasse
qui leur rafraîchirait le coeur et la mémoire. Comme dans un film, deux
demis, quelques sourires et c'est parti.
Amour amour, les chiens sont lâchés, et les voilà partis pour le Sablier.
Il y avait au programme, en ce soir de printemps, un chanteur fleur bleue, un peu naïf, un peu niais. C'était excellent pour ce qu'ils avaient.
Et le concert terminé, près du hangar à vélo, il lui dit « je sais pas
comment te dire au revoir ». C'était sa phrase habituelle. Elle lui expliqua
en clignant des yeux deux fois. Il l'embrassa. Et ils s'en allèrent vers le
terrain voisin, un terrain de rugby dont les côtés - il l'avait déjà
remarqué - formaient un plan incliné d'environ 30 degrés. Ce qui, pour de
jeunes romantiques, était un lit parfait.
|