« Plus de sentiments, plus d’économies, plus de temps, plus de réussites ». Tels sont les effets d’Internet, si j’en crois la brochure d’un des principaux fournisseurs d’accès français. « Découvrez tout ce qu’Internet change dans votre vie », proclame la brochure. On y fait effectivement de grandes découvertes.
« Plus de temps », déclare la brochure. « Je veux organiser mes vacances sans perdre un après-midi ? ». Mot de passe Foutoidnoo : « En quelques minutes, je mets en mémoire des photos d’hôtels en Espagne et en Italie pour les consulter plus tard avec ma femme. Fini les piles de catalogues ». Personnellement, je suis sceptique. Je mets au défi quiconque d’être en mesure de présenter à sa femme un éventail de photos d’hôtels en Espagne et Italie sans y passer trois après-midis.
« Plus de réussites », poursuit la brochure, s’attaquant au point sensible, l’éducation des enfants : « J’ai un exposé sur les Mérovingiens à rendre lundi ». Mot de passe Foutoidnoo : « Je trouve beaucoup d’informations en tapant seulement le mot "Mérovingiens" dans l’annuaire QuiQuoiOuHeinComment. Je vais enfin avoir la meilleure note ». L’esprit de synthèse, on s’en fout. Un coup d’Altavista, un copier-coller sous Word et ça fait un exposé. C’est l’avantage d’Internet.
« Plus d’économies », ment-on plus loin. « Je dirige une PME qui fabrique des meubles de style provençal, mais je n’ai aucun budget pour la faire connaître ». Mot de passe Foutoidnoo : « Je dispose d’un espace gratuit pour présenter mes produits au monde entier. Mes bergères vont avoir du succès ». C’est le fameux mensonge d’IBM, l’utopie du e-business : il suffit d’ouvrir un site Web pour que des clients du monde entier liquident votre stock en moins d’une heure. Personne n’y croit plus. Les marchands pleurent devant leurs statistiques. Ils ne gagnent même pas de quoi se payer un mouchoir.
« Plus de sentiments », délire-t-on page 8. « La Corse me manque depuis que je suis parti travailler sur le continent ». Mot de passe Foutoidnoo : « J’ai tous les sites de mon île en mémoire sur mon ordinateur et je les consulte quand je veux. Sans prendre l’avion ». Je ricane. Nous ne pourrons être fiers d’Internet que lorsque les Corses pourront travailler depuis la Corse avec leurs clients, que ceux-ci aient la chance de vivre dans les Côtes d’Armor ou le triste privilège de déambuler dans les tours de la Défense.
Parce qu’entre nous, la mer en JPEG, c’est un peu décevant.