« Internet : un nouveau terrain d’expression pour les passionnés de l’écrit », annonce fièrement la publicité d’une « filiale d’un des premiers groupes de communication » qui n’ose pas dire son nom. Ma foi, ne suis-je pas un passionné de l’écrit ? N’ai-je pas « déjà compris qu’Internet [serait mon] nouveau vecteur d’expression » ?
Je m’apprête donc à informer le sympathique cabinet Consulting & Search VIDAL Associates que je suis, sans nul doute, l’un des « collaborateurs à fort potentiel » tant désirés par la filiale sans nom, et que je mettrai mon dynamisme et ma créativité au service de leurs produits multimédia, et veuillez agréer gnagnagna.
Fort de mon expérience, je dédaigne le poste de Webmaster (« internaute passionné maîtrisant les outils ») et lorgne vers le poste prestigieux de Responsable Editorial : « Intégralement responsable du site et de son contenu éditorial, vous animerez votre équipe avec enthousiasme ». Décidément, mon nouveau boulot sera merveilleux.
Je me sers donc une bière et poursuis ma lecture : « En synergie avec l’équipe marketing, vous définissez la politique éditoriale ». Quoi ? Que lis-je ? Il y aurait sur notre réseau bien aimé des sites Web dont le contenu rédactionnel serait dicté par de basses considérations marketing ? Je n’ose y croire.
« Par votre sens des opportunités, vous initiez des partenariats et concevez des opérations de promotion ». Mais pourrai-je un jour promouvoir Jean-Marc Sylvestre ou tout autre Footix de la pensée unique ? Arriverai-je sans vomir à initier un partenariat avec MédiaPost pour « valoriser » le profil de mes lecteurs ? Serai-je seulement capable d’animer avec enthousiasme mon équipe d’éditeurs chargés de « définir la structure, le contenu de l’information (sic) », et les « ouvrages à valoriser » ?
Je crois que mon sens des opportunités est en train de me lâcher. Je continuerai donc à tenir cette modeste chronique, ce pendant que les soutiers de la filiale sans nom accoucheront d’applets splendides vantant les mérites du dernier roman d’une Mazarine Pingeot.