Claude Allègre présentait lundi à Hourtin un bilan triomphal de ses initiatives en faveur des nouvelles technologies. 82% des lycées et plus de 60% des collèges seraient aujourd’hui connectés à l’Internet, a-t-il assuré lors de l’ouverture de l’université d’été de la communication, ajoutant que cette performance laisse admiratif dans le monde entier, de l’Europe aux Etats-Unis. Grâce à son action, « la France, en un an, est passée de lanterne rouge européenne à une zone de dynamisme ».
Mais comme l’écrivait hier Laurent Mauriac dans Libération : « ces chiffres mirifiques, dont le ministre n’a pas précisé la source, mériteraient d’être complétés par une autre statistique : celle du nombre d’ordinateurs connectés à l’Internet dans chaque lycée ou collège... ». Il suffit en effet d’offrir un abonnement Wanadoo monoposte à un collège pour que celui-ci soit qualifié de « connecté à l’Internet » par le ministre de l’Education. Ce qui ne garantit en rien un accès aux écoliers.
Claude Allègre, pourtant, s’interroge déjà sur l’opportunité de construire encore des amphithéâtres pour les universités du troisième millénaire : « L’acte d’enseigner n’a pas varié depuis des millénaires : il y a celui qui sait d’un côté, celui qui apprend de l’autre ». L’éducation idéale, pour Claude Allègre, serait sans doute d’avoir un ignare de chaque côté. Un réseau d’imbéciles communicants.
Et comme toujours lorsqu’il s’exprime sur ce sujet, Claude Allègre a encore martelé lundi son ambition « de faire naître une industrie du logiciel éducatif », pour laquelle il vient de dégager quelque 200 millions de francs.
Son argumentation est effrayante : parce que la « mondialisation a fait du secteur éducatif un marché », le pays doit de toute urgence mobiliser ses pédagogues en s’affranchissant de son « colbertisme étroit ». Le rôle d’un ministre de l’Education, qui plus est un ministre « de gauche », ne serait-il pas de lutter contre cette industrialisation de l’Education, ce démantèlement d’un service public essentiel au profit d’un (juteux) marché ?
Cette nouvelle prise de position du Ministre inconscient ne fait donc
que conforter l’analyse de Gérard de Sélys :
L’école, grand marché du XXIe siècle