De jeunes cadres qui me font l’amitié de lire ces chroniques m’ont dit « trouver ça chiant » quand je parle de libéralisme et préfèrer les dépêches insolites ou le roman de ma petite vie de client. Soyons clairs : ces petites histoires, que 500 abonnés reçoivent désormais chaque jour, n’ont pas pour seul objectif de vous faire sourire. Elles voudraient susciter des réflexions, donner à chacun l’envie de les prolonger par des discussions, susciter des envies de lecture.
Dès lors, ma récompense n’est pas proportionnelle au nombre d’abonnés, ou au nombre de "hits" enregistrés sur le site : la page la plus accédée sur mon site est celle des « autoroutes de la masturbation », les internautes y parvenant en recherchant un certain mot dans l’encyclopédie mondiale.
Mon plus grand plaisir, lors de ma (petite) déprime de juin, fut de recevoir ces courriers qui m’expliquaient vos rapports aux chroniques. Ceux d’entre vous, notamment, qui s’étaient laissés bercer par le discours rassurant des médias et qui, jour après jour, le trouvaient si grotesques qu’ils recherchaient aujourd’hui, à travers le Diplo, la lecture de Bourdieu ou de « Géopolitique du chaos », une analyse, des arguments à opposer à la bêtise ambiante. Ceux qui réagissent à une chronique sur les délocalisations, en m’opposant le point de vue indonésien ou mexicain. Ceux qui me font parvenir des articles, me conseillent des lectures. Même si je n’ai pas le temps de répondre à tous les courriers, j’y accorde toujours une grande attention.
Alors l’échec ? C’est d’entendre le « c’est chiant quand t’es sérieux » de ceux qui ne cherchent plus à s’informer, qui ne lisent plus ni presse ni bouquins. Qui zappent lorsqu’on parle de la Russie ou de l’Indonésie. L’échec ? C’est d’entendre, dans le même temps, d’autres vous reprocher vos chroniques trop égotistes, « vos diatribes sur des sujets sans intérêt ».
J’ai parfaitement conscience de leur superficialité : je fais ma une de petites histoires parfaitement anecdotiques, sur la vie sexuelle de Clinton ou sur les utilisateurs de mobiles. Elles tentent simplement de ridiculer le cirque médiatique, de « démoder l’avenir », pour reprendre l’expression de Vialatte. D’amener les gens à réfléchir, en partant d’un petit rien humoristique.
Je suis de près l’actualité internationale, des inondations en Chine à la crise en Russie. Mais sur ces sujets, impossible d’écrire autre chose que du « chiant », des noms compliqués, des problèmes lointains. Je ne peux donc que vous renvoyer vers la presse quotidienne, pour savoir, et vers le Diplo, pour comprendre. Du moins pour ceux d’entre vous qui ne trouvent pas ça trop « chiant ».