Les Chroniques du Menteur
Accueil du site > Marketing > Balophobie

Balophobie

vendredi 20 novembre 1998, par Pierre Lazuly

Je ferai aujourd’hui l’éloge de la balophobie, cette affection dont souffrent certains esprits archaïques, lesquels luttent, parfois désespérément, contre la pollution de leur boîte à lettres. Cette brave boîte qui, les bons jours, contenait quelques lettres d’amour, les mauvais, des lettres de créanciers, déborde désormais de publicités. Tels sont les effets du progrès.

Et ça ne fait que commencer car, si j’en crois la Poste, « la boîte à lettres des Français n’est pas saturée ». Il suffit pour s’en convaincre de visiter le site de Médiapost, la regrettable filiale marketing direct de la Poste. « Les Français expriment une véritable demande pour la publicité en boîte à lettres », y apprend-on. « Le potentiel du media boîte à lettres est prometteur ».

D’ailleurs, une enquête est là pour le confirmer : « Les Français n’ont aucune antipathie pour la publicité qu’ils reçoivent dans leur boîte à lettres, au contraire, 63% d’entre eux sont BALophiles, ils apprécient la publicité en boîte à lettres. Ces deux catégories se redécoupent en deux classes selon l’intensité de leur opinion : 63% de BALophiles, dont 45% sont des « réceptifs actifs » et 18% sont des « accros insatiables ». 37% sont BALophobes, dont 27% sont des « réticents » et 10% sont des « allergiques rédhibitoires ». Si la BALophobie est un frein à la lecture (sic), une proportion importante de BALophobes se laissent tout de même convaincre par la publicité et achète les produits ou services présentés dans les imprimés ».



INGÉNIOSITÉ DU BALOPHOBE

Un mien lecteur, pour qui la catégorie d’« allergique rédhibitoire pervers » mériterait presque d’être créée, m’a fait parvenir le récit de ses aventures balophobiques, récit paru initialement dans la publication trimestrielle de l’association Résistance à l’Agression Publicitaire en avril 1997 :

« En décembre 95, bien décidé à commencer une nouvelle année sans publicité, j’ai décidé d’apporter une petite modification sur ma boîte à lettre normalisée recommandée par la Poste. J’ai installé un verrouillage électromagnétique sur le volet de ma boîte, lequel est alimenté en basse tension par l’intermédiaire d’un programmateur hebdomadaire.

Ensuite, j’ai réglé ce dernier pour que l’ouverture du volet soit possible, entre 09h45 et 12h30. Etant donné la ponctualité du préposé de mon quartier ce réglage c’est avéré satisfaisant. Le passage des distributeurs de publicité ne se situant pas pendant cette période, ce système se révèle pour moi très efficace. D’autre part, j’ai aussi installé un microcontact détectant l’ouverture de ce volet. Cela m’a d’abord permis de connaître l’heure moyenne de passage du préposé, et ensuite d’avoir une détection visuelle ou sonore de courrier. Un deuxième microcontact est d’ailleurs indispensable pour détecter l’ouverture de la porte lors du dépôt d’un colis. L’ensemble est alimenté par un câble genre téléphone. Pour une boîte éloignée du domicile, il est tout à fait possible de concevoir un système autonome ».

Hélas, même cet ingénieux mécanisme ne suffit pas à se protéger des assauts publicitaires, comme nous le confirme mon lecteur bricoleur :

« A trois reprises fin 97 j’ai trouvé la porte de ma boîte ouverte sans effraction. En janvier 98 j’ai installé un détecteur sonore d’ouverture et j’ai pu apercevoir le plaisantin. En septembre dernier, manoeuvre identique avec signature de l’auteur puisque la porte était refermée avec quatre prospectus à l’interieur. Le 29 septembre 1998 j’ai adressé une plainte contre X au Procureur de la République pour abus de confiance, recel d’abus de confiance, effraction et violation de domicile. Aujourd’hui je n’ai toujours pas de réponse.

J’ai fait cette dernière démarche en m’aidant d’un fait similaire. Il y a un an le président de l’association RAP a surpris un distributeur qui entrait dans son immeuble avec un passe (de la Poste...). La plainte a été déclarée recevable, et l’affaire suit son cours... »

Je ne manquerai pas de vous tenir informé des issues de cette affaire. En attendant, je vous laisse sur ces quelques conseils pratiques...



POUR LUTTER CONTRE LA PUBLICITÉ ADRESSÉE

  • Renvoyer à l’expéditeur sans timbrer, après avoir rayé votre nom et marqué « refusé » sur l’enveloppe.
  • S’inscrire (gratuitement) sur la liste « Stop publicité » en envoyant vos coordonnées à l’Union Française du Marketing Direct, 60, rue de La Boétie, 75008 Paris. Pour une inscription collective, demander le formulaire UFMD à R.A.P.
  • S’inscrire (gratuitement) sur la liste orange de France Télécom auprès de votre agence ou au 1014.


POUR LUTTER CONTRE LA PUBLICITÉ DÉPOSÉE
  • Apposer sur votre boîte un autocollant exprimant votre refus.
  • Écrire à votre receveur pour lui demander d’épargner votre boîte. En cas de refus, déposer dans les boîtes de la Poste ce qu’elle a déposée dans la vôtre.
  • Renvoyer la publicité dans une enveloppe sans timbre à la société vantée par le prospectus ou le catalogue (il y a forcément une adresse).
  • Signer et faire signer la pétition « Pas de publicité dans ma boîte aux lettres », disponible auprès de R.A.P.


    d’après un document édité par :
    Résistance à l’agression publicitaire (R.A.P.)
    53, rue Jean Moulin, 94300 VINCENNES
    Tel 01 43 28 39 21, fax 01 47 12 17 71
    http://www.antipub.net

PIERRE LAZULY
Accueil | SPIP | Quitter