Le social-démocrate Gerhard Schroeder a battu hier le chancelier chrétien-démocrate Helmut Kohl aux législatives allemandes, mettant ainsi fin à 16 années de pouvoir. L’Allemagne devrait donc être dirigée, comme la majorité des pays européens, par une coalition de centre-gauche et appliquer, comme la majorité des pays européens, une politique libérale : la privatisation des services publics et l’ouverture à la concurrence de tout et n’importe quoi.
Il faut dire que Gerhard Schroeder avait axé sa campagne sur le thème de la modernité. Un peu comme la publicité pour le shampoing : « Moi, je vis avec mon temps, le progrès ». C’est un homme pragmatique, nous dit-on. Souriant comme un Blair, travailleur comme un Jospin et de gauche comme un Madelin. On ne saurait être plus moderne.
Sauf peut-être dans l’Ohio. Le débat politique prend là-bas, si j’en crois Reuters, une bien étrange tournure. Le gouverneur de l’Ohio, George Voinovich, vient en effet de lancer la police aux trousses d’un poulet. David Lulkin, 23 ans, est le poulet visé : contre 1.000 dollars par mois, celui-ci se promène, revêtu d’un costume de poulet, dans les meetings électoraux du gouverneur, afin (je cite) « de mettre le gouverneur républicain dans l’embarras et le convaincre de débattre avec sa patronne, la démocrate Mary Boyle ».
Ça vous paraît peut-être idiot, mais c’est d’une intelligence redoutable. La démocrate Mary Boyle peut désormais clamer dans les journaux que le gouverneur gaspille les impôts de ses administrés en affectant la police à la surveillance d’un poulet. Il suffisait d’y penser.
Pendant ce temps, Jean Paul II disait quelque chose d’intelligent. Ça méritait d’être signalé. Le pape a condamné dimanche « le contraste intolérable entre une portion de l’humanité qui jouit de tous les avantages du bien-être et du progrès scientifique, et la masse énorme de ceux qui vivent dans des situations d’indigence extrême ».
La plus belle chose à lire, enfin, en ce lundi matin pluvieux, c’est un court extrait de « Toute une vie bien ratée » de Pierre Autin-Grenier (aux éditions l’Arpenteur) :
« Je rêve que je reste au lit toute la journée et que j’abandonne à la Confédération nationale du patronat français le soin de faire tourner les affaires pour son plaisir personnel et moi, la couette tirée jusqu’aux oreilles, je mijote bien au chaud dans cette atmosphère à la Marcel Proust comme un petit lapin aux framboises se bonifiant à feu doux au creux d’un vieux faitout de cuivre »
Bonne semaine à tous !