Je croyais avoir tout dit de la téléphonie mobile : ceux qui parlaient fièrement de leur « liberté sans fil » passaient pour des imbéciles ; les autres s’excusaient avant de décrocher, et on leur pardonnait. Bientôt, le fin du fin serait de le laisser chez soi, ou bien de n’en avoir pas. Qui sait attendre finit toujours par redevenir à la mode.
Telles étaient mes pensées, samedi dernier, alors que j’exposais mon corps ambré aux regards enjôleurs de jeunes filles dénudées. Après tout, le téléphone gisant sur leur serviette n’avait été déposé là que dans l’espoir inconscient de me séduire. Elles ne pouvaient pas savoir que je n’attendais qu’une chose, et que c’était qu’il fonde. De cette perte-là, je les aurais volontiers réconfortées.
Hélas, ces engins-là ne fondent pas. La bonne nouvelle, c’est qu’ils ne sonnaient pas. Les gens sont devenus raisonnables, me dis-je, ils éteignent leurs portables. Sera-t-on à nouveau tranquille sur le sable ?
Je suis souvent moqueur, rarement méchant, et lorsque je vois un avion, je souhaite rarement qu’il s’écrase. Il me faut pourtant avouer que samedi dernier, telles furent bien mes pensées : le petit appareil qui vrombissait joyeusement au-dessus de nos têtes était en effet affublé d’une banderolle : « Itinéris, 1er réseau de mobiles, couvre votre plage ».
Telle est la perversion de la téléphonie mobile : lorsque ses clients par miracle vous laissent tranquille, c’est l’opérateur qui vient vous imposer ses publicités débiles.