Catherine Trautmann, ministre de la Culture et de la Communication, vient d’annoncer une série de mesures visant à moderniser la presse. Ça doit être mon côté archaïque, mais lorsque j’entends parler de « moderniser la presse », je prends peur. Je tends l’oreille. Et j’ai bien raison.
Cette fois, donc, c’est au tour de la presse d’être modernisée. La commission ad hoc a tranché : la presse quotidienne sera modernisée par la mise en place d’un « fonds de modernisation de la presse quotidienne et assimilée ». On ne saurait être plus socialiste. Ce fonds soutiendra des projets destinés à « augmenter la productivité des entreprises » et à favoriser « l’amélioration du contenu rédactionnel et la diversification vers de nouveaux supports ».
Qu’« augmenter la productivité des entreprises » soit une preuve de modernité, c’est une chose acquise, mais que cette « augmentation de productivité » de la presse puisse contribuer à « l’amélioration du contenu rédactionnel » n’autorise qu’une conclusion, et celle-ci est bien triste : c’est que par amélioration du contenu rédactionnel, on entende amélioration de sa pauvreté.
Alors, oui, on peut augmenter la productivité du Monde : on peut même doubler son volume, en recopiant les communiqués de presse et en supprimant les analyses. Le journal n’en sera que plus moderne. Je suis persuadé que les journalistes du Monde sont infiniment moins « productifs » que les agenciers. Ils sont obligés de réfléchir, ils perdent du temps. Ils devront s’adapter.
« L’intégration de la déontologie dans la formation des journalistes sera favorisée », apprenait-on également de source gouvernementale. L’intégrer dans la formation, c’est bien ; l’intégrer dans la profession, ce serait mieux.
La seule modernisation valable, pour la presse, s’appellerait l’indépendance. L’amélioration des contenus exigerait donc avant tout que la presse se libère de l’influence des industriels et de celle des marchés. C’est une mesure qu’on a dû oublier.